8 juin 2009

Médias et Contre-Révolution




Le titre qui précède est redondant. Le capitalisme est contre-révolutionnaire; les medias qu'il possède ou finance tendent à l'être aussi. De la même façon qu'ils dominent notre production matérielle, les monopoles étrangers contrôlent une grande partie de notre diffusion. CNN régit l'information télévisée, suivie par ABC, NBC et CBS. Cisneros Group of Companies est associé aux transnationales GM Hughes Electronics Corp des Etats-Unis, TV Abril du Brésil et Multivisión du Mexique. Pour nous fortifier en tant qu'émetteurs, les latino-américains devons installer de nouvelles agences d'information. Fixer des limites brèves et précises pour la durée des concessions de l'espace radioélectrique. Réguler ou limiter les conditions dans lesquelles le capital étranger peut participer dans les moyens de communication latino-américains. Stimuler la création de publications, stations de radio et chaines de télévision de service public et de réseaux alternatifs et communautaires qui compensent la prépondérance des moyens de communication privés

Medias


L'Amérique Latine représente 10% de la population mondiale, et seulement 8,2% des journaux: la moitié de ceux qui circulent dans le Tiers-Monde. La propriété de ses moyens est extrêmement concentrée, tant verticalement qu' horizontalement. C'en est ainsi pour les plus de 5000 émetteurs AM de la région, et pour les quasiment 2 milliers de chaînes de télévision. La proportion d'émetteurs du service public ou alternatifs est insignifiant. En 1998 las pays les plus développés, qui comptent seulement pour 15% des habitants de la planète, représentent 88% des usagers d'Internet. Les Etats-Unis, avec seulement 5% de la population mondiale, compte plus de 50% des usagers. L'Amérique Latine et les Caraïbes comptent seulement un pourcentage de 0,8% d'usagers de la toile en relation avec sa population, selon le Rapport sur le Développement Humain de l'ONU de 1999. Nous, latino-américains, devons élargir nos efforts pour éduquer les audiences dans l'usage discriminatoire et rationnel des moyens de communication. Exiger que la propriété de la majorité de ces moyens de communication soit sociale, ou au moins nationale ou de latino-américains. Nous devons créer des régimes de libre circulation et commerce des biens culturels produits dans la région. Établir des accords entre nos pays pour financer et employer conjointement les technologies de transmission, comme les satellites de communication et la fibre optique, et élargir drastiquement nos capacités et moyens en ce qui concerne l'informatique, de laquelle dépendra de façon croissante la communication du futur.

Codes


Les moyens de communication divulguent ce qu'ils considèrent d'une importance mineure seulement avec le code linguistique. L'idéologie et la politique en lettre d'imprimerie ou en émission radiale. L'élévation du message culmine avec le code Roi de la publicité, renforcé par la musique, l'intonation, la gestuelle, les costumes, la scénographie et les codes magiques du montage, les effets spéciaux et la séduction subliminale, appliqués aussi à la propagande politique. Nous devons gérer les possibilités d'intégration et d'élévation de codes pour la création de messages qui collent à notre réalité. Encourager une éducation qui permette la décodification des messages et la critique de l'idéologie latente en eux. Défendre le castillan, le portugais et les diverses langues étrangères ou indigènes qui font partie des identités latino-américaines et caribéennes.


Récepteurs

L'intégration de l'Amérique Latine et des Caraïbes passe par l'intégration de ses moyens de communication, et le premier de nos changements révolutionnaires doit être de les soumettre à un contrôle social. Nous devons terminer le processus d'alphabétisation afin d’incorporer la majorité des latino-américains au plaisir de la communication écrite. Donner des cours sur la sélection et l'interprétation des messages des moyens de communication. Donner du pouvoir aux organisations sociales populaires, coopératives et comités d'usagers, pour corriger les déviations et les pathologies des medias et exiger des changements dans la législation relative à ces moyens. Convertir les récepteurs en émetteurs en créant des moyens de communication alternatifs et en obtenant, par loi ou pression sociale, des espaces dans les moyens de communication conventionnels.

Messages


Le rapport des Nations Unies de 1999 sur le Développement Humain révèle qu'à la fin du 20ème siècle l'Amérique Latine importait 70% de sa programmation télévisuelle: 62% en provenance des Etats Unis et 8% d'Europe et d'Asie, et ne produit qu'a peine 30% de sa programmation. La quantité d'importations d'origine latino-américaine est d'à peine 12%. Les normes protectionnistes de la production nationale ne sont quasiment jamais respectées. Communiquer c'est retransmettre les messages de la métropole. Pour les Etats-Unis, la majeure industrie d'exportation est celle des films et des téléfilms, lesquels collectent plus de 30 milliards de dollars à l'extérieur en 1997. Un Tiers des films projetés en Europe provient des Etats-Unis, alors que les Etats-Unis importent seulement 1% des films projetés (PNUD 1999). Celui qui domine la communication dirige les divertissements, celui qui dirige les divertissements tyrannise la culture. La crise du capitalisme est la crise de ses medias: il faut construire le nouveau par dessus ses ruines. Nous devons passer de la dénonciation des moyens de communication contre-révolutionnaires à la création de messages révolutionnaires, informatifs, éducatifs, de divertissement. Rejeter les programmes réactifs qui recyclent les thèmes de l'adversaire, éliminer l'agression du public exercée par les medias privés à travers de l'interruption systématique, le rabâchage de pages de publicité répétitives, la destruction des programmes avec des images insérées. Retirer les privilèges douaniers pour l'importation de téléfilms et de programmes mis en conserve. Investir les fonds ainsi épargnés dans nos créations. Et faire respecter les normes, comme la "Ley Resorte", qui protègent la production nationale, ainsi que restructurer les organismes qui, bien qu'ils soient obligés de le faire, ne font pas respecter ses lois.
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Texte de Luis Britto Garcia

Traduction par R. V. (me contacter pour éventuelles améliorations)

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