28 juin 2009

Le Tribunal Suprême de Justice blesse la Souveraineté

(vous pouvez lire le Rappel des faits)
"Nous avons perdu le droit à être jugés selon nos lois, les commissions d'arbitrage étrangères n'ont jamais favorisé notre pays." remarquait l'écrivain et avocat Luis Britto García.

Entretien réalisé par Carlos Díaz pour le journal LA RAZÓN, le 14-06-2009

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La Cour Constitutionnelle du Tribunal Suprême de Justice a rejeté la demande d'interpréter l'article 151 de la Constitution bolivarienne, où il est établit que les controverses générées dans des contrats d'intérêt public devront être solutionnés dans un tribunal vénézuélien, et qui a été présentée par l'ancien ambassadeur du Venezuela à l'ONU, Fermín Toro Jiménez, et par l'avocat et écrivain Luis Britto García, entre autres. A ce propos, Britto García affirme, dans un entretien avec LA RAZÓN, que cette sentence a comme intention "ni plus ni moins que de détruire la souveraineté du Venezuela":

- La souveraineté comprend le pouvoir absolu et perpétuel de la République de fixer ses propres lois, les appliquer avec sa propre autorité et solutionner les controverses la concernant avec ses propres lois et tribunaux.

- Ces principes sont inhérents à la notion même de souveraineté, et depuis que en 1868, l'internationaliste argentin Carlos Calvo, indigné par l'invasion de la France et de l'Angleterre au Mexique soutenait que: 1) Les Etats ne peuvent pas intervenir dans les affaires d'autres Etats, en vertu du principe d'égalité entre nations 2) les étrangers ne peuvent pas avoir plus de droits et de privilèges que les nationaux, 3) les entreprises et citoyens étrangers doivent solutionner leurs controverses devant les tribunaux internes au territoire de l'Etat dans lequel ils sont établis.

- Des pays comme la Bolivie, le Honduras et le Venezuela ont inclut dans leurs constitutions et leur législation la "Clause Calvo", qui oblige les investisseurs étrangers à résoudre les controverses sur leurs contrats avec des organismes publics uniquement et exclusivement dans les tribunaux des Etats récepteurs et en accord avec leurs lois. Au Venezuela nous avons inclut explicitement ce principe dans la Constitution depuis 1893, dans l'article 149 qui dit que: "Aucun contrat d'intérêt public célébré par le Gouvernement National ou Régional ne pourra être cédé, totalement ou en partie, à des gouvernements étrangers". Pour tout les contrats d'intérêt public il faudra respecter la clause selon laquelle: "Les doutes et controverses de toute nature qui pourraient être suscitées sur son exécution seront décidées par les tribunaux vénézuéliens et conformément aux lois de la République, sans que ces contrats puissent être, en aucun cas, motif de réclamations internationales."

Avec ce jugement, l'Etat Vénézuélien se retrouve-t-il désavantagé face aux grandes transnationales dans les tribunaux étrangers?

Bien sur. Tout d'abord, il perd le droit â être jugé selon nos propres lois. Deuxièmement, il perd le droit à être jugé par ses propres tribunaux. Troisièmement, il doit mettre en place de complexes et couteux mécanismes de défense sur des territoires étrangers, ou confier ses intérêts à des cabinets de mercenaires. Et, enfin, les arbitrages étrangers n'ont pratiquement jamais favorisé notre pays, et d'une manière générale ils prennent des décisions contre les pays en voie de développement et en faveur des transnationales.

GRAND NOMBRE D'ACTIONS EN JUSTICE

La cour constitutionnelle répond-elle, avec cette sentence, aux intérêts des transnationales au lieu de défendre les intérêts et la souveraineté du pays?

Jugez par vous même. Cela convient aux transnationales d'être immunisées contre les lois et tribunaux des pays où elles obtiennent leurs dividendes, et avec cette sentence elles l’obtiennent. Nous sommes exposés à ce que, à n'importe quel moment, Exxon ou une conspiration de transnationales nous crible d'actions en justice devant les tribunaux ou les commissions d'arbitrage étrangères et que nous terminions condamnés de manière indigne par ces juridictions. Exxon a déjà tenté d'imposer un embargo sur nos réserves internationales. Le Tribunal Suprême de Justice a mis en leurs mains l'instrument pour nous ruiner.

Cela pourrait-il annihiler la souveraineté législative et juridictionnelle du Venezuela?

Lamentablement oui. A partir de maintenant il est inutile que le Venezuela légifère pour défendre ses intérêts, parce que les controverses sur ses contrats d'intérêt public pourront être décidées en accord avec des lois étrangères, ou selon l'avis d'une commission arbitrale. Il est aussi inutile d'avoir des tribunaux, parce que les décisions les plus importantes relatives aux intérêts publics seront prises par des organismes étrangers.

Comment expliquez vous que le TJS (Tribunal Suprême de Justice) rejette le recours en justice en considérant que les appelants n'ont pas "la qualité ni les intérêts" pour cet objet?

Chaque citoyen a la qualité et l'intérêt en ce qui concerne les matières d'intérêt public de son propre pays. Fermín Toro Jiménez et moi les avons, comme le prouve le fait que nous ayons tenté de défendre la souveraineté du Venezuela sur tous les terrains. Ceux qui paraissent n'avoir pas l'intérêt ni la qualité c'est le TJS.

LA COUR CONSTITUTIONNELLE A RENIÉ LA SOUVERAINETÉ

Cette sentence constitue-t-elle un recul en matière de souveraineté?

Simón Bolivar et Cipriano Castro ont du trembler dans leurs tombes. Imaginez que l'on ai dit a Bolívar que les controverses sur les contrats d'intérêt public de la Grande-Colombie auraient pu être résolus par une Cour Espagnole. On dirait que certains compatriotes ne sont pas au courant que nous avons gagné la bataille de Carabobo.

En quoi diffèrent les critères de la Cour Constitutionnelle et ceux de la Quatrième République, en matière de Souveraineté?

En rien. Mais même la Quatrième République n'avait pas osé renier la souveraineté du Venezuela en des termes si catégoriquement anticonstitutionnels.

BRÉSIL ET FAJA PETROLIFERA DEL ORINOCO

La remise de "Faja Petrolífera del Orinoco" au Brésil signifie-t-elle la vente du futur de la Nation et le renoncement à la Souveraineté Nationale?

"Faja Petrolífera del Orinoco" ne peut pas être remise au Brésil ni à aucun autre pays parce que le sous-sol appartient de façon inaliénable à la République du Venezuela.

Cette décision de l'Executif et de son homologue du Brésil a-t-elle une relation avec l'action en justice que vous avez présenté devant le TSJ avec Fermín Toro Jiménez et qui a été rejetée postérieurement?

Je l'ignore. Mais, si une transnationale soutient devant un tribunal étranger que le sous-sol vénézuélien lui appartient, et que ce tribunal ou commission d'arbitrage lui donne raison, selon le critère du TSJ nous devrons lui rendre notre sous-sol. Je veux dire, si 30 millions de vénézuéliens acceptons de lui céder.

Que pensez-vous de la décision de l'OEA (Organisation des Etats Américains) de lever la sanction de Cuba et permettre sa réincorporation?

Enfin l'OEA annule une décision honteuse, anachronique et qui témoigne sa servitude aux Etats-Unis. Cette décision pourrait donner un second souffle à l'OEA, qui est en train d'être remplacé par l'UNASUR.

RÉCLAMATIONS ÉTRANGÈRES

Les transnationales ne sont-elles pas obligées de savoir que ce type de contrat viole la Constitution et la Souveraineté Nationale?

Pour éviter que l'on prétexte la méconnaissance, depuis plus d'un siècle nos Constitutions, celle de 1999 inclue, stipulent que dans ces contrats "une clause selon laquelle les doutes et controverses qui ne pourraient pas être réglées à l'amiable par les parties seront décidées par les tribunaux compétents de la République, en conformité avec ses lois, sans que pour aucun motif il puisse être à l'origine d'une réclamation étrangère." L'ignorance de la loi n'excuse pas son non accomplissement, et encore moins la supposée méconnaissance de la Constitution.

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Traduction de R.V.
Lire l'article original ici

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