Affichage des articles dont le libellé est television. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est television. Afficher tous les articles

20 juin 2010

Huit mois sans voir la télé




Dans le film « Les incorruptibles » de Brian de Palma, le gangster Al Capone souhaite bon appétit a un compagnon en lui assenant un coup de batte de base-ball sur le crane. Cela résume le traitement des gérants des médias envers leurs audiences. Pour qu’elles consomment un produit, ils les gavent de spots publicitaires jusqu'à ce que cela les ennuie.

Ils oublient un détail: il y a 50 ans on inventa la télécommande. Il est inutile d’envoyer une surdose de publicité à une audience qui la fuit en changeant de chaine. Celui qui essaye de rompre le crane du public, finit par avoir mal à la tète.

Avec la télécommande le gérant se retrouve face a une alternative : rendre la publicité supportable sur sa chaine, ou insupportable sur toutes les chaines. Vous savez déjà l’option qui a été choisie. En conséquence de cela le public a abandonné la télévision gratuite. Malheureux le gérant qui frappe son propre nid.

Mais où a donc fuit l’audience? Moi j’ai jeté l’éponge et je suis resté 14 ans sans regarder le petit écran. D’autres ont trouvé asile dans la TV payante car elle offrait des programmes Premium sans interruptions.

Grace à cette promesse, la TV payante registrée couvrait en 2008 26% des foyers, 3 millions de familles, autour de 15 millions de vénézuéliens. Cavetsu calcule sur sa page web que 40% de foyers supplémentaires reçoivent ces services à travers d’opérateurs pirates. La débandade vers la TV payante fut majoritaire.

Je suis tombé moi aussi dans la fausse idée selon laquelle celui qui paye pour ce qu’il voit a le droit á ce que l’on respecte la loi et á ne pas être escroqué. Mais pour les gangsters il n’y a pas d’audience, seulement des victimes, et il n’y a pas de produits mais seulement une massue. Le gérant de médias qui en a fini avec la TV gratuite pointe déjà sa batte vers la TV payante.

Ceci explique, comme le savent tout les vénézuéliens sauf la Conatel, que la TV payante, alors qu’elle est explicitement obligée á respecter la « Ley Resorte », assène chaque minute de diffusion un coup de bâton sur le crane de celui qui paye.

En effet, dans chacune des ses émissions le volume de publicité augmente illégalement. Dans toutes les transmissions de films, la limite légale de 15 minutes de publicité par heure est largement dépassée. Les info-publicités occupent quatre heures de suite, ce qui représente bien plus que les dix pour cent du total de la programmation journalière.

Les infractions contre l’article 8, qui interdit la publicité par insertion, sont encore plus sanguinaires, et elles assassinent l’image avec des superpositions de lettres et d’interfaces étrangères á elle. Sur les chaines Premium, qui offrent des films sans interruption, ils sont tous abimés par des insertions étrangères á l’image originale. Dans les clips vidéo il y a des fois jusqu'à 4 insertions simultanées qui se font concurrence pour le détruire. Dans certains espaces, de stupides logos publicitaires sont insérés durant tout le programme. Des fois la journée entière, seconde après seconde, minute après minute, heure après heure, semaine après semaine.

Ceci n’arrive dans aucune autre région du monde. La faute n’est pas du gangster, mais de la Conatel qui lui donne le gourdin. Le mafieux a-t-il enfin ligoté son audience afin de lui détruire le crane a coups de batte ?

Un rapport de la Kaiser Family Foundation des Etats-Unis du mois de mars 2010 indique où sont en train de fuir les victimes. Entre 2004 et 2009, les jeunes ont diminué leur temps passé devant la télévision de 25 minutes, se déplaçant vers des médias comme le téléchargement Internet, le chat, la téléphonie mobile, les ipods, les jeux vidéos interactifs, les pages de vidéos comme YouTube et les réseaux sociaux.

Le livre “La Televisión en España: Informe 2009, souligne qu’il y a une frange du public, constitué par les jeunes et les personnes avec un haut niveau d’éducation, qui sont en train de délaisser la télévision. La vidéo et la radio á la carte, les systèmes interactifs et mobiles, les combinaisons intelligentes de medias, les discothèques, bibliothèques et journaux digitaux remplacent le coup de bâton sur la tête (Miriam Lagoa: “Imparable fuga de audiencia televisiva a Internet”; EL PAÍS; Madrid, 28-8-2009).

Et la Corporación Estatal Radio Televisión Española est en tête de tout les taux d’audience depuis qu’elle a supprimé la publicité. (Carlos Alberto Sánchez: “Sin publicidad, la audiencia ve más la televisión” 18-1-2010.) Un avertissement pour toutes nos chaines publiques, qui copient tout les défauts des chaines privées, alors qu’elles n’ont pas besoin de nous saturer de publicité puisque nous les payons avec nos impôts.

Le gérant tueur de public, après tout, effraie son audience sous prétexte que la télévision est un business et que l’argent que donne la publicité justifie n’importe quel délit.

Le pire de tous les délits commis par le gérant tueur de publics est que, après avoir anéanti la télévision gratuite et payante, il entre dans la télévision du service public afin d’y imposer la loi de mauvais traitements de l’audience.

Je connais la majorité des dirigeants des médias du service public, et je les considère intelligents, honnêtes et estimables. J’ai de l’admiration et de l’affection pour certains d’entre eux. Comment donc ont-ils laissé entrer dans leurs institutions le gérant tueur de publics, avec sa batte pliée á force de détruire tant de médias et ses dysfonctionnements idéologiques, hormonaux et érectiles qu’il traine depuis la moitié du siècle passé ?

Comment peut-on expliquer que Roman Chalbaud et Rodolfo Santana se soient appliqués á produire « Amores de Barrio Adentro » pour que le gangster á la batte l’anéantisse en changeant systématiquement le calendrier et les horaires et en la retransmettant seulement comme support pour insérer des ceintures de pub annonçant des événements anodins et des consignes superflues ?

Que est l’objectif, á part celui de faire fuir l’audience, de la pratique qui consiste á ce que tout les programmes intéressants de télévision publique soient systématiquement interrompus par des intrusions, qui sont elles mêmes coupées par de nouvelles digressions, qui sont elles aussi interrompues jusqu'à ce que le téléspectateur change de chaine ?

Quel message prêche-t-on lorsque un chef d’œuvre comme « Memorias del Subdesarrollo » de Tomás Gutiérrez, est seulement diffusé pour être assassiné par un tas d’interruptions, de messages publicitaires et d’insertions qui montrent au public que l’art sert seulement á être détruit ?

Au nom de quoi Avila TV, le meilleur exemple de chaine jeune et contestataire, permet que le gangster gâteux et variqueux á la batte cassée interfère dans ses programmes en y superposant des logos, icones, rubans et figurines jusqu'à empêcher que le public comprenne de quoi il s’agit ?

La seule chose plus dangereuse qu’un singe avec un couteau c’est un imbécile avec une machine qui génère des caractères.

A ceux qui ne comprennent pas encore l’effet destructeur des insertions de contenu étranger à un programme, je vous rappelle qu’Hugo Chavez Frias a été renversé par les chaines privées qui ont interféré avec la télévision publique et ont inséré leurs propres images pour empêcher que le Président élu transmette son message.

L’insertion d’une image pour perturber un contexte original distinct n’est pas seulement une violation de la « Ley Resorte » : c’est une leçon de vandalisme, de manque de respect a la création artistique, une confession d’échec du communicateur qui ne sait pas rendre son message attractif et se venge en détruisant ceux des autres. En d’autres mots, c’est la prêche frénétique du capitalisme sauvage, qui parasite et détruit l’effort d’autrui sur l’autel de la ruine collective.

Le message publicitaire est l’idéologie du capitalisme. Mc Luhan disait que le media est le message. On ne peut pas diffuser un message socialiste avec les procédés de l’entrepreneur prédateur. L’image insérée et le programme se détruisent mutuellement.

La télévision publique, communautaire et alternative doit être un exemple de respect de la loi et de la culture, d’amitié envers le public, d’éducation et surtout d’audience majoritaire. Divertir et éduquer avec des programmes au lieu d’ « imbéciliser » avec des messages publicitaires a fait de Corporación Radio Televisión Española le leader en audiences. Ce chemin est ouvert pour tous. Il suffit de jeter á la poubelle une batte abimée ainsi que celui qui la brandit.
Si la révolution perd son audience, elle pourrait perdre ses votants. C’est ce que veulent les tueurs de votes et les tueurs de publics.

Le 14 Juin, alors que j’attendais l’opération d’un ami, j’ai vu dans la clinique le match de l’Italie contre le Paraguay, et il n’y a pas eu une seule interférence. Il ont passé de la publicité á la mi-temps mais ils n’ont pas détruit l’événement qu’ils transmettaient. Ceci explique peut être certains mystères de l’audimat.

Depuis novembre 2009 j’avais arrêté de regarder la télévision. Je l’ai allumé hier pour voir si cela valait la peine de m’y remettre. Sur l’écran un logo superposait le programme. J’ai éteint l’appareil pour regarder le paysage.

<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<

Version original ICI

30 mai 2010

Monopoles médiatiques et guerres médiatiques




Texte de mon intervention lors du Forum "Le Monopole Médiatique: Colonisateur d’imaginaires et exploiteur de consciences", réalisé avec Ignacio Ramonet et la Grande Bibliothèque de l’Université de Montréal

Guerres militaires et batailles médiatiques

La guerre, comme le disait Clausewitz, est la continuation de la politique par d’autres moyens. La politique, ajoutait-il, est la poursuite de la culture par d’autres voies. Celui qui veut gagner la confrontation politique et militaire doit gagner la bataille culturelle, qui de nos jours se livre en grande partie dans les médias de communication. C’est pour cela que la guerre médiatique est généralement le préambule de la politique et de la stratégie. Les guerres militaires ont des trêves ; les guerres culturelles sont incessantes, globales, perpétuelles.

Monopoles Economiques et Médiatiques

Les guerres contemporaines se livrent entre puissances impérialistes pour la conquête de colonies et de marchés, et entre puissances impérialistes et pays en voie de développement pour les réduire en semi-colonies. De tels conflits ont lieu pour répondre aux besoins des monopoles. Les monopoles médiatiques ressemblent aux monopoles financiers, industriels et commerciaux comme des gouttes d’eau. Ils luttent tous pour s’étendre, se concentrent en de moins en moins de mains, utilisent la politique comme un instrument pour augmenter le pouvoir, a travers des lois qui facilitent l’accumulation ou a travers des conflits qui étendent les marchés et s’approprient les ressources. Leur objectif commun est de placer l’infrastructure économique sous contrôle total du capital monopolistique et de soumettre la superstructure culturelle, qui elle même détermine la conduite de l’Etat et de la société, aux monopoles médiatiques

Monopoles contre les pays en voie de développement

Les guerres des tout-puissants monopoles capitalistes et médiatiques contre les faibles pays en voie de développement sont asymétriques, pour l’inégale proportion de ressources stratégiques et économiques. Mais la victoire ne favorise pas toujours les propriétaires des plus puissantes armes de coercition stratégique et culturelle. Examinons la guerre médiatique livrée au Venezuela durant la première décennie du 21éme siècle, par les transnationales et la corporation patronale contre le projet de révolution démocratique et pacifique, qui gagne les élections de 1998 avec une majorité écrasante.

Oligopoles médiatiques contre démocratie

En 1999, quand Hugo Chávez Frías prend le pouvoir, son gouvernement compte seulement, comme instruments de communication, une chaine de télévision nationale et une radio nationale, toutes 2 avec une portée très limitée. L’opposition, dont le commandement politique est assumé par la corporation patronale Fedecámaras, compte près de soixante chaines de télévision, plus de 700 radios et près d’une centaine de journaux. La quasi-totalité d’entre eux attaquent le gouvernement de manière frontale, sauf les journaux « Últimas Noticias » et « Panorama », qui tendent á présenter les informations avec un certain degré de neutralité. La quasi-totalité de ces médias sont des exemples finis de concentration oligopolistique verticale et horizontale. Ils sont entre les mains de familles, ou d’un petit nombre d’actionnaires, et le même capital contrôle parfois aussi des radios, journaux, entreprises qui produisent du contenu, maisons de disques, agences de publicité et de relations publiques et de conseil en image. Ils ont pour habitude de recycler les thèmes, campagnes et points de vue des grands monopoles transnationaux de la communication, lesquels á leur tour recyclent les contenus et les informations locales des oligopoles vénézuéliens.

Guerre médiatique et attaque à la constitutionalité

Depuis 2001, le patronat et son impressionnante concentration de médias, avec l’appui économique, diplomatique et logistique des Etats Unis, a déclaré ouvertement la guerre au gouvernement élu. Ils font des campagnes massives contre 49 lois de réformes modérées, appellent á remplacer le gouvernement élu par un gouvernement de transition, ils diffusent des annonces de putsch d’anciens officiels qui disent représenter toute l’armée et être prêts a dérouter les autorités légitimes par la force. En avril 2002 les médias appellent á la grève, qui est en réalité un lock-out patronal, convoquent une manifestation le 11 de ce mois vers le Parque del Este , qui sera finalement déviée vers le Palacio de Miraflores, coupent la chaine de télévision a travers laquelle le Présidant se dirige a la Nation, présentent des images de gens du peuple qui se défendent face á des francs-tireurs en inventant le mensonge comme quoi ils tirent sur une manifestation en réalité inexistante, diffusent un discours de putsch militaire contre le gouvernement ainsi que la fausse nouvelle de la démission du Président élu, forcent au silence á la Télévision et a la Radio Nationale, acclament l’instauration d’une dictature qui annule la Constitution qui avait été dictée par un vote populaire et destitue tout les fonctionnaires élus, et occultent la grande mobilisation sociale et la réponse des militaires constitutionalistes qui restituent le Président légitime au pouvoir le 13 avril. Les monopoles économiques comptaient avec la quasi-totalité des medias dans la presse, radio et télévision ; le peuple avait seulement le bouche á oreille, les téléphones, les portables. L’omnipotence médiatique n’est pas omnipotence culturelle ni politique.

Lock-out Patronal et sabotage pétrolier

Une fois de retour au pouvoir, le président élu n’adopte aucune sanction contre les putschistes ni contre les médias. Ceux-ci ne tardent pas á mettre en marche une opération identique : au début du mois de Décembre 2002 ils convoquent un autre lock-out patronal, cette fois accompagné d’un sabotage contre l’industrie pétrolière et d’une expérience audiovisuelle jamais vécue avant cela dans le monde contemporain. Pendant plus de 2 mois pratiquement tout les medias privés se lancent dans une campagne d’appels au renversement par la force du gouvernement élu, remplacent la publicité par 17 500 messages déstabilisateurs et l’information par des mensonges. Le gouvernement élu ne suspend pas les garanties constitutionnelles et ne déclare pas l’état d’exception, il répond a peine a travers une chaine de télévision et une radio qui ne couvrent même pas tout le territoire national, et cependant la gigantesque offensive patronale, médiatique et putschiste s’effondre toute seule, comme un géant aux pieds d’argile qui ne peut pas s’établir face au compact rejet populaire.

Impotence de l’Omnipotence médiatique

En vérité, en aucun des événements décisifs de la vie vénézuélienne des dernières années les monopoles médiatiques n’ont pu imposer leurs critères. Ils n’ont pas pu empêcher le soulèvement massif du 27 février 1989 contre le Fond Monétaire International, qui a secoué le pays pendant une semaine. Ils n’ont pas pu dévier la sympathie populaire envers le rébellion militaire du 4 février 1992. Ils n’ont pas restauré la foi du peuple envers les partis du statut, ce qui entraina l’expulsion virtuelle de ceux-ci durant les processus électoraux depuis 1993. Ils n’ont pas pu vaincre la candidature d’Hugo Chávez Frías lors des élections de 1998. Malgré le pacte de soutien avec le dictateur Carmona, ils n’ont pas pu empêcher la chute de celui-ci ni le retour du Président élu. Ils n’ont rien pu non plus en 2002 et 2003 lors du lock-out patronal et du sabotage pétrolier, ni en 2004 lors de l’ignorance de l’arbitre électoral. Ils n’ont pas pu non plus inciter la défaite du mouvement bolivarien lors du référendum d’aout 2004, ni empêcher le retentissant succès lors des élections régionales cette même année. Ils ont vaincu en une seule occasion, en 2007, en réussissant, a travers une campagne basée sur la terreur, a ce que le gouvernement perde, a 50 000 votes près, le referendum pour une réforme constitutionnelle complète. Malgré le monopole capitaliste et médiatique, le projet bolivarien a obtenu durant cette décennie une légitimité grâce a ses victoires dans plus d’une douzaine d’élections, toutes sous la surveillance de centaines d’observateurs internationaux qui n’ont jamais remise en cause aucune d’elles.

Mesures contre l’agression médiatique

Suffit-il donc d’attendre que l’adversaire s’effondre pour vaincre dans une guerre médiatique ? L’exemple du Venezuela montre qu’il est possible de livrer un conflit médiatique face á une opposition putschiste et violente sans s’éloigner un brin du strict accomplissement des normes de la légalité démocratique. Mais pour cela il faut lancer une contre-offensive sur quatre fronts ; 1) création de médias de service publique, mais aussi de médias alternatifs, libres et communautaires 2) Régulation législative de l’espace radioélectrique 3) Usage souverain du pouvoir de l’Etat d’attribuer et de rénover ou non les concessions sur l’espace radioélectrique 4) Éducation du public

Médias de service public, alternatifs, libres, communautaires

Afin d’appliquer ces tactiques, le gouvernement démocratique a crée a partir de 2003 les chaines Vive, de documentaires communautaires, Telesur, dirigé a l’audience latino-américaine, Ávila TV, jeune et contestataire ; a redonné du pouvoir a Venezolana de Televisión et Radio Nacional, a acquit le circuit de radio YVKE Mundial et crée la Radio Del Sur. Plusieurs centaines de petites radios communautaires ont surgi, unies entre elles a travers de l’Association Nationale de Medias Communautaires, Libres et Alternatifs. En 2003 les communistes éditent Diario Vea, et en 2009 le processus bolivarien imprime le Correo del Orinoco. Des centaines de petites publications alternatives apparaissent et disparaissent aussi.

Normes régulatrices

En Décembre 2005, au milieu du débat enflammé avec l’opposition, l’Assemblé Nationale approuve la “Loi de Responsabilité Sociale a la Radio et Télévision (Resorte)”. Cette loi développe les normes constitutionnelles et exige véracité, opportunité et pluralité dans l’information, limite le temps de publicité, établit des pourcentages de production nationale et indépendante, étend sa portée a la télévision payante, qui représente plus du tiers de l’audience du pays. Ce triomphe est en partie annulé car les medias ne respectent pas les normes, et la Commission Nationale de Télécommunications ne les fait pas respecter.

Gestion souveraine des concessions

En 2007 la majorité des concessions sur l’usage de l’espace radioélectrique, octroyées en mai 1987 pour une durée de 20 ans, ont expiré. Le gouvernement les a toutes rénové pour une durée de 5 ans, sauf celle de Radio Caracas Televisión, qui a elle seule représentait plus de la moitié de la facture publicitaire de la télévision, et qui, avec Venevisión, avait intégré un cartel pour empêcher l’arrivée de nouvelles chaines de télévision et les amener á la ruine en offrant des tarifs inferieurs aux publicitaires qui promettaient de ne pas s’annoncer chez eux. Alors que le directeur de RCTV Marcel Granier faisait un tour pour implorer les gouvernements européens d’intervenir au Venezuela et incitait les médias vénézuéliens à convoquer une fois de plus un soulèvement dans le pays, le 11 Juillet 2007 le propriétaire d’un des groupe multinational de communication les plus important d’Amérique, Diego Cisneros, divulguait dans les medias une confession qui éclairait la situation du Venezuela. Il affirma : « Beaucoup de gens dans le gouvernement ou l’opposition croient qu’un canal de télévision peut être protagoniste du jeu politique. Mais ceci n’est pas la mission de la télévision (...) Les chaines, je le répète, ne peuvent pas prendre partie dans le conflit national ou prétendre remplacer les partis politiques, si ils ne veulent pas aggraver le conflit. C’est ce qui se passe au Venezuela. » (El Nacional, 12-7-2007, p.4, Nación). RCTV a reçu l’autorisation de continuer á diffuser sur les chaines payantes, mais cela a réduit considérablement son audience. En mars 2010 la chaine a refusé de respecter les conditions requises pour transmettre a travers d’une chaine payante, raison pour laquelle elle n’émet plus depuis cette date.

Education du public

En ce qui concerne l’éducation du public dans la décodification des messages médiatiques, peu d’initiatives systématiques ont été adoptées. Un brillant programme d’analyse des médias diffusé sur VTV depuis 2004, « La Hojilla », sous les ordres de Mario Silva, exerce une critique pédagogique quotidienne, non sans passion et humour. « El Quiosco Veraz », de Earle Herrera, fait la même chose chaque semaine. A l’Institut d’Etudes Avancées* (IDEA) des cours de maitrise sur les médias comme acteurs politiques ont été impartis. Le Ministère du Pouvoir Populaire pour la Communication et l’Information a édité des livres et convoqué des Forums sur ce sujet. La perversité du message médiatique requiert cependant une action pédagogique généralisée, qui n’implique pas seulement tout les médias, mais aussi le système éducatif

Essor et chute du Quatrième Pouvoir

Mais le facteur décisif de cette longue confrontation fut que, tout au long de plus d’une décennie, les monopoles médiatiques ont perdu progressivement la confiance du public. Les journaux El Universal et La Nación ont vu leur tirage passer de 100 000 exemplaires a une moyenne proche de 50 000; ce dernier affrontant une sévère crise économique. Parallèlement à cela, les journaux plus équilibrés, Últimas Noticias et Panorama, ont dépassé les tirages de 360 000 exemplaires lors de leurs éditions dominicales. Apres sa carte de 2007 dans laquelle il signalait que le rôle des médias comme acteurs politiques ne contribuait pas á la paix dans le pays, Diego Cisneros a modéré partiellement l’agressivité de la chaine Venevisión. En 2010 la chaine d’opposition la plus violente, Golobovisión, a retiré de la direction le plus frénétique opposant, Federico Alberto Ravell. Ces changements n’enlèvent rien á la prêche du plan d’attaquer l’Etat: ils la Font juste moins violente, persistante et évidente. Il ne faut jamais oublier que la guerre médiatique est le préambule de la guerre stratégique: du lock-out patronal, du sabotage pétrolier et du coup d’Etat au Venezuela; de l’agression militaire extérieure dans d’autres pays et peut être même dans le notre. Des médias alternatifs, libres et communautaires, des normes régulatrices, le maniement des concessions et l’éducation sur les medias permettent de se défendre des campagnes médiatiques, pas des putschs ni des invasions.

Contrôle Social des médias

Alors que les moyens de production matérielle son entre les mains d’une minorité, celle-ci cherchera aussi a contrôler les moyens de production intellectuelle et les utiliseront pour leurs intérêts exclusifs. De la même façon qu’avec les monopoles économiques et financiers, la victoire face aux monopoles médiatiques arrivera seulement quand les travailleurs auront la propriété sociale des moyens de production matérielle et intellectuelle et les mettra a son service. N’importe quel autre triomphe est seulement une escarmouche.


<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<

Traduit par R.V.
Article en espagnol ici

8 juin 2009

Médias et Contre-Révolution




Le titre qui précède est redondant. Le capitalisme est contre-révolutionnaire; les medias qu'il possède ou finance tendent à l'être aussi. De la même façon qu'ils dominent notre production matérielle, les monopoles étrangers contrôlent une grande partie de notre diffusion. CNN régit l'information télévisée, suivie par ABC, NBC et CBS. Cisneros Group of Companies est associé aux transnationales GM Hughes Electronics Corp des Etats-Unis, TV Abril du Brésil et Multivisión du Mexique. Pour nous fortifier en tant qu'émetteurs, les latino-américains devons installer de nouvelles agences d'information. Fixer des limites brèves et précises pour la durée des concessions de l'espace radioélectrique. Réguler ou limiter les conditions dans lesquelles le capital étranger peut participer dans les moyens de communication latino-américains. Stimuler la création de publications, stations de radio et chaines de télévision de service public et de réseaux alternatifs et communautaires qui compensent la prépondérance des moyens de communication privés

Medias


L'Amérique Latine représente 10% de la population mondiale, et seulement 8,2% des journaux: la moitié de ceux qui circulent dans le Tiers-Monde. La propriété de ses moyens est extrêmement concentrée, tant verticalement qu' horizontalement. C'en est ainsi pour les plus de 5000 émetteurs AM de la région, et pour les quasiment 2 milliers de chaînes de télévision. La proportion d'émetteurs du service public ou alternatifs est insignifiant. En 1998 las pays les plus développés, qui comptent seulement pour 15% des habitants de la planète, représentent 88% des usagers d'Internet. Les Etats-Unis, avec seulement 5% de la population mondiale, compte plus de 50% des usagers. L'Amérique Latine et les Caraïbes comptent seulement un pourcentage de 0,8% d'usagers de la toile en relation avec sa population, selon le Rapport sur le Développement Humain de l'ONU de 1999. Nous, latino-américains, devons élargir nos efforts pour éduquer les audiences dans l'usage discriminatoire et rationnel des moyens de communication. Exiger que la propriété de la majorité de ces moyens de communication soit sociale, ou au moins nationale ou de latino-américains. Nous devons créer des régimes de libre circulation et commerce des biens culturels produits dans la région. Établir des accords entre nos pays pour financer et employer conjointement les technologies de transmission, comme les satellites de communication et la fibre optique, et élargir drastiquement nos capacités et moyens en ce qui concerne l'informatique, de laquelle dépendra de façon croissante la communication du futur.

Codes


Les moyens de communication divulguent ce qu'ils considèrent d'une importance mineure seulement avec le code linguistique. L'idéologie et la politique en lettre d'imprimerie ou en émission radiale. L'élévation du message culmine avec le code Roi de la publicité, renforcé par la musique, l'intonation, la gestuelle, les costumes, la scénographie et les codes magiques du montage, les effets spéciaux et la séduction subliminale, appliqués aussi à la propagande politique. Nous devons gérer les possibilités d'intégration et d'élévation de codes pour la création de messages qui collent à notre réalité. Encourager une éducation qui permette la décodification des messages et la critique de l'idéologie latente en eux. Défendre le castillan, le portugais et les diverses langues étrangères ou indigènes qui font partie des identités latino-américaines et caribéennes.


Récepteurs

L'intégration de l'Amérique Latine et des Caraïbes passe par l'intégration de ses moyens de communication, et le premier de nos changements révolutionnaires doit être de les soumettre à un contrôle social. Nous devons terminer le processus d'alphabétisation afin d’incorporer la majorité des latino-américains au plaisir de la communication écrite. Donner des cours sur la sélection et l'interprétation des messages des moyens de communication. Donner du pouvoir aux organisations sociales populaires, coopératives et comités d'usagers, pour corriger les déviations et les pathologies des medias et exiger des changements dans la législation relative à ces moyens. Convertir les récepteurs en émetteurs en créant des moyens de communication alternatifs et en obtenant, par loi ou pression sociale, des espaces dans les moyens de communication conventionnels.

Messages


Le rapport des Nations Unies de 1999 sur le Développement Humain révèle qu'à la fin du 20ème siècle l'Amérique Latine importait 70% de sa programmation télévisuelle: 62% en provenance des Etats Unis et 8% d'Europe et d'Asie, et ne produit qu'a peine 30% de sa programmation. La quantité d'importations d'origine latino-américaine est d'à peine 12%. Les normes protectionnistes de la production nationale ne sont quasiment jamais respectées. Communiquer c'est retransmettre les messages de la métropole. Pour les Etats-Unis, la majeure industrie d'exportation est celle des films et des téléfilms, lesquels collectent plus de 30 milliards de dollars à l'extérieur en 1997. Un Tiers des films projetés en Europe provient des Etats-Unis, alors que les Etats-Unis importent seulement 1% des films projetés (PNUD 1999). Celui qui domine la communication dirige les divertissements, celui qui dirige les divertissements tyrannise la culture. La crise du capitalisme est la crise de ses medias: il faut construire le nouveau par dessus ses ruines. Nous devons passer de la dénonciation des moyens de communication contre-révolutionnaires à la création de messages révolutionnaires, informatifs, éducatifs, de divertissement. Rejeter les programmes réactifs qui recyclent les thèmes de l'adversaire, éliminer l'agression du public exercée par les medias privés à travers de l'interruption systématique, le rabâchage de pages de publicité répétitives, la destruction des programmes avec des images insérées. Retirer les privilèges douaniers pour l'importation de téléfilms et de programmes mis en conserve. Investir les fonds ainsi épargnés dans nos créations. Et faire respecter les normes, comme la "Ley Resorte", qui protègent la production nationale, ainsi que restructurer les organismes qui, bien qu'ils soient obligés de le faire, ne font pas respecter ses lois.
///////////////////////////////////////

Texte de Luis Britto Garcia

Traduction par R. V. (me contacter pour éventuelles améliorations)

Pour voir la version originale cliquez ici